vendredi 25 décembre 2015

Marx, me voilà

J'ai toujours eu du mal à considérer les syndicats, notamment ces dernières années, comme un corps intermédiaire capable de dialoguer sereinement avec le gouvernement et le patronat et d'être une force de propositions constructives. Je les perçois plutôt comme des empêcheurs de tourner en rond, des personnes qui montent au créneau pour réclamer toujours plus d'acquis et qui considèrent qu'on doit encore vivre comme au temps du Front populaire voire du début des années 80. Des périodes où les avancées sociales ont été importantes et sur lesquelles se repose encore notre société. Pour penser ainsi, je m'appuie sur des exemples concrets dans le monde hospitalier ou dans celui du BTP, des univers qui me sont familiers grâce à mon entourage. Et puis je le constate régulièrement grâce à l'actualité. Je pense d'ailleurs qu'il serait fondamental, pour que les syndicats possèdent une vraie force, et pèsent ainsi dans les négociations face au gouvernement et au patronat qu'il faudrait que les conventions, accords qu'ils négocient ne profitent qu'aux salariés syndiqués. Je trouve aberrant que seulement 8% de la population active soit syndiquée mais que l'ensemble des travailleurs bénéficient des négocations. 

Toujours est-il que dans le supermarché pour lequel je bosse, il serait bienvenu qu'un responsable syndical vienne de temps en temps, histoire de rappeler aux salariés qu'ils n'ont pas à rogner sur le peu d'acquis qu'ils ont dans leur milieu.
Certes, le travail d'employé commercial est à temps partiel, sur les six salariés, quatre au moins le sont, la responsable adjointe ainsi que son assistant tournent eux, plus souvent autour de 35 heures. Mais ce n'est pas une raison pour que les journées complètes suivent un rythme aussi dingue. Le travail commence à 8 heures ou 7 h 45 pour celui ou celle qui se charge de faire cuire le pain; la pause déjeuner est d'une heure entre midi et 14 heures; une pause de 15 minutes a lieu aux alentours de 16 h 30 avec un système de rotation; le travail s'achève à 19 h15.

Sauf qu'il est très rare de sortir du supermarché à 19 h 15 et que tout le monde est au magasin sur les 7 h 45, 7 h 50 et attaque dans la foulée. De ce fait, les journées sont longues, 10 h 15, et régulièrement, les salariés ne respectent pas le temps de travail. Combien de fois, ma collègue mademoiselle M n'a pris que 5 minutes pour sa pause de l'après-midi? L'autre fois, c'est madame B qui n'a pris que quelques minutes avant de revenir à sa caisse "parce qu'il y a du boulot". Franchement, sur le principe, je trouve que c'est abusé, d'ailleurs j'ai fait la réflexion à ma collègue. On est capable de gérer le temps des pause de chacun. Et si les clients sont mécontents parce qu'ils attendent quelques minutes en plus, tant pis. Ce n'est pas à nous d'en faire les frais, eu égard au salaire que l'on perçoit et à la polyvalence dont on doit être capable. 

Le 24 décembre, nous n'étions que trois à travailler. Ma responsable m'a fait comprendre qu'elle aimerait que je ne prenne que 45 minutes pour déjeuner "soit le minimum légal" car "ça l'arrangeait". Et pour cause: le 24, les clients ont afflué en continu, contre toute attente! Le rayon fruits et légumes a finalement été rempli aux alentours de midi, soit très tardivement par rapport au timing habituel. Et il a fallu assurer le réassort toute la journée et mettre à la vente des nouveaux produits correspondant à ce qu'annonce le catalogue.
J'ai accepté sauf que l'après-midi, il n'y a pas eu de pause et que nous sommes sortis à 17 h 25 du magasin au lieu de 17 h 15. Même pas un merci ni rien, c'était considéré comme normal par la responsable qui, elle-même, a choisi de ne pas prendre de pause déjeuner.

Si encore il n'y a avait pas cet impératif de rendement, d'être toujours obligé d'être constamment occupé, de sorte que regarder son téléphone portable est carrément mal vu sous peine de se prendre une réflexion du genre: " Vous faites quoi avec votre téléphone? Vous avez un temps de pause, il est fait pour cela, maintenant, allez me ranger cette caisse " (ma responsable qui s'adresse à moi après 2 h 45 d'un flot ininterrompu de clients!) Je ne trouverai pas que c'est abusé. Sauf que c'est ce rythme qui est imposé au quotidien. Et visiblement, dans d'autres supermarchés, c'est pire...

mercredi 23 décembre 2015

L'habit ne fait pas le moine


« Vous finissez de faire vos courses, vous payez et vous ne revenez plus, vous avez bien  compris monsieur ce que vous a dit ma collègue?. » Il était aux alentours de midi, ce mercredi 23 décembre, quand monsieur A, le responsable adjoint, d'habitude si sympathique, bien que toujours concentré sur ses tâches, adressa ses paroles d'un ton sec à l'encontre d'un vieil homme. Limite grabataire, cheveux blanc, voix à peine audible, il était entrain de déposer ses articles sur le tapis en fin de caisse quand monsieur A lui est tombé dessus sans crier gare. Le vieillard a hoché la tête, mais en fuyant le regard de mon responsable. Et pour cause: il avait été pris la main dans le sac. Et ce n'était pas la première fois qu'il était surpris à remplir ses poches de produits divers pour éviter de les payer. C'est madame B qui l'a encore coincé. Elle a l'oeil affuté, les voleurs, elle les repère. Cette fois-ci, il s'agissait de beurre et de sucre mais la dernière fois, c'était d'autres articles. Le vieillard avait déjà eu un avertissement, madame B avait même joué la carte de la compassion en disant « que cela pouvait arriver à tout le monde (de remplir ses poches de produits non achetés) ».
Mais visiblement, cet avertissement n'avait servi à rien et l'homme, 75 ans bien trempés, avait décidé de récidiver, avant d'être à nouveau confondu. 

Souvent, les personnes que les responsables de magasin nous demandent d'observer avec attention sont les jeunes avec leur sac à dos, habillés "en wesh wesh", ou les gens d'origine étrangère: du délit de sale gueule et de jeunisme, en somme. Mais en fait, cette anecdote rappelle qu'il faut se méfier de tout le monde dans un supermarché et pas seulement de ceux qui semblent a priori, très différents de nous. 

Les voleurs ne sont pas souvent pris sur le fait car régulièrement des bouteilles d'alcool notamment, sont dérobées dans le magasin. Et ce sont des produits plutôt chers comparé à ce qui composent l'essentiel du supermarché. 
Pendant un temps, le supermarché a employé un agent de sécurité quelques jours par semaine mais visiblement, ce n'était pas rentable. En période de Noël, où les jours de la semaine, en termes de chiffre d'affaire, sont équivalents au samedi, mademoiselle R aimerait en embaucher un. Elle le demande tous les ans mais visiblement, son avis n'est pour l'instant pas pris en compte par sa hiérarchie et au premier rang de laquelle, son responsable de secteur, monsieur D. Je me demande à combien de centaines d'euros s'élèvent les pertes chaque mois. Très certainement, d'un montant moins élevé que le salaire d'un agent de sécurité. 


dimanche 20 décembre 2015

Causeries quotidiennes


Les conversations de comptoir n'ont jamais été ma tasse de thé. Entretenir une discussion avec la coiffeuse lorsque je me fais couper les cheveux non plus, car les sujets abordés sont généralement ennuyeux et banals. 

Mais j'ai assez vite compris que la plupart des clients étaient à la recherche de ce genre d'échanges avec la caissière de leur supermarché du coin. Car s'ils viennent dans ce magasin, ce sont d'abord pour des raisons évidentes, telles que la variété des produits, la surface, le prix attractif, mais aussi parce qu'ils sont toujours bien accueillis et notamment en caisse où finalement chacun des employés fait l'effort d'engager la conversation, de glisser un petit mot sympa, de rendre un sourire... Pour certains clients, et notamment les plus âgés d'entre eux ou ceux se trouvant au ban de la société, nous sommes les seules personnes qu'ils verront de la journée, nous sommes un peu comme leur rayon de soleil. Car contrairement aux grandes surfaces classiques, nous sommes certes un magasin important en termes de chiffre d'affaire, mais nous sommes une petite équipe. L'ambiance qui y règne est conviviale, chaleureuse entre les employés et elle se ressent dans la manière de traiter les clients, c'est du moins l'impression que j'ai. 

Alors j'ai pris sur moi pour correspondre aux attentes des clients: que j'encaisse correctement et que je sois aimable et souriante. Car ils sont exigeants. Quelques uns m'ont fait remarquer que ma responsable, mademoiselle R, n'était pas toujours très aimable. L'un d'entre eux m'a même dit qu'il lui achèterait un sourire pour Noël! Preuve qu'ils sont attentifs à la manière dont ils sont reçus et même si mademoiselle R n'est pas toujours commode, elle a un bon fond. Et en caisse, elle est souvent rigolote. Elle a toujours un bon mot ou une réflexion marrante à lancer, du genre: une après-midi, une cliente vient me voir me demandant si je n'avais pas quelque chose pour l'aider à retirer son jeton coincé dans le caddie. J'appelle ma responsable: " Vous n'auriez pas un petit truc pour aider madame à retirer son jeton du caddie? Elle répond avec un sourire légèrement dissimulé: " Le petit truc... c'est moi et mon tournevis, ça vous va madame?" 

D'une semaine à l'autre, voire d'un jour à l'autre, on retrouve les habitués, et madame B, depuis le temps qu'elle est employée dans ce magasin, commence à connaître tout le monde. Ce qui fait qu'elle parle des travaux dans sa maison, répond quand les clients la questionnent sur la difficulté du métier, évoquent ses enfants... et les clients ont l'air d'apprécier les échanges car ils sont nombreux à me demander où elle est quand elle ne travaille pas. Il faut dire que cette femme truculente est également à elle seule un sketch. Toujours un mot pour rire, possède un humour parfois caustique, n'a pas peur de dire aux messieurs quand ils sont spectateurs et quand leurs femmes font tout le boulot. Bref, les clients se marrent bien avec elle aussi. 

La grande majorité des gens est super sympa, par conséquent, d'un effort, c'est devenu très vite un plaisir d'échanger avec eux. Ce sont des petits moments furtifs distillés tout au long de la journée au gré des humeurs de chacun. 



jeudi 17 décembre 2015

Le rendement : un objectif assumé et poursuivi

Ma main me servant d'antisèche.
Il y a la célèbre phrase de Jacques Séguéla «  Si à 50 ans, on n'a pas de Rolex, on a quand même raté sa vie » et puis il y a toutes ses adaptations dont la mienne: « Si en tant que caissière, tu ne réussis pas à passer 3000 articles par heure, alors t'as un peu raté ta vie! »

Bon heureusement qu'il ne s'agit pas pour moi de faire carrière dans ce domaine d'activité parce que ça fait quatre jours que je stagne à seulement 2300 articles à l'heure. Mais mademoiselle R, ma responsable se veut encourageante: « Vous grimpez, lentement mais sûrement! » Ce à quoi j'ai répondu: « Oui mais en fait, je me prends mon temps ». (Et je me suis abstenue de lui dire que j'avais fait une pointe à 2500 un jour où elle était en congé ;-))

Après tout, je ne suis qu'en CDD, je ne gagne pas de prime de rendement, en plus de mon salaire alors pourquoi m'évertuer à aller vite pour rien? Si ce n'est pour le fun car le challenge consiste à rattraper les collègues qui eux, sont de vraies machines et touchent plusieurs dizaines d'euros supplémentaires tous les mois grâce à leur efficacité en caisse. 

La chaîne de magasins pour laquelle je travaille aime bien chronométrer ses employés et notamment en caisse où sont comptabilisés plusieurs paramètres: le nombre d'articles par heure donc, mais également le temps d'encaissement, le temps entre le moment où on appuie sur la touche "Total" et sur la touche correspondant au moyen de paiement, le temps que l'on met à refermer le tiroir... Ils sont un peu frappés dans cette boîte quand j'y pense. Mais mes collègues n'ont pas l'air traumatisé, tout juste mademoiselle M m'a-t-elle fait remarquer dernièrement, qu'elle avait été ce jour-là juste en dessous des 3000 articles, à 2998, histoire d'être légèrement énervée en fin de journée.

La meilleure coach pour devenir la caissière de l'année, c'est madame B, une petite blonde potelée, au rire rafraîchissant, présente dans la boîte depuis huit ans et demi et qui compte bien y rester encore 18 mois « histoire d'obtenir la prime pour services rendus après dix années de dur labeur ». Le 2e  ou 3e  jour, elle était en caisse 2, épiait les moindres de mes faits et gestes (en même temps qu'elle faisait elle-même son taf) et me répétait sans arrêt "Total!" "Total" "Total"! Afin que je prenne le rythme et ne laisse pas filer des centièmes de secondes passés inutilement entre le dernier article et le début de l'encaissement. Ou alors pour me rappeler que pour arrêter le décompte, il faut taper un code (notamment après l'encaissement d'un client et que le prochain a un gros caddie à décharger, il faut arrêter sa caisse et ne reprendre qu'un fois le client est passé devant nous avec son chariot). Madame E, elle est cool alors quand elle a compris qu'elle me saoulait un peu elle est venue me glisser à l'oreille: « Si je suis derrière vous, c'est pour que vous soyez opérationnelle le plus vite et que vous preniez les bonnes manières. » 

Sauf que pour être efficace, il faut maîtriser la chaîne de A à Z or:
- les clients lents, ils existent. Pourtant, j'essaie de les mettre dans le rythme mais bon, ce n'est pas donné à tout le monde;
- les codes des légumes et des fruits pour la pesée, ce n'est pas en quelques jours que je peux tous les apprendre par coeur, d'autant que régulièrement il y a de nouveaux produits qui prennent place et donc de nouveaux codes à se souvenir. Mademoiselle R m'a refilé un vieux répertoire avec des pages volantes pour m'en sortir mais c'est un peu la galère. Heureusement, mademoiselle M a été régulièrement ma "sauveuse" au début. Je n'avais qu'à brandir mon fruit ou légume et elle dégainait plus vite que son ombre pour me donner le code à entrer. 

Maintenant que j'ai pris de l'assurance dans le passage des articles et l'encaissement, je me concentre davantage sur l'apprentissage des codes mais il m'arrive d'effectuer des tests: "Poires rondes, c'est 89 ou 87 ?" Et quand je me trompe, ça ne fait que deux lignes sur le ticket de caisse des clients en plus! ;-)
- les rouleaux des TPE à changer;
- le client qui vient te demander un jeton ou un remboursement ou un échange ou une info;

Bref, je me donne jusqu'au 24 pour arriver à 3000 articles par heure, histoire de montrer que j'en ai sous le pied, comme dit l'expression ;-)

PS: cette notion de rendement s'exprime dans la manière d'agir au quotidien. Mademoiselle R trouve inadmissible qu'un employé reste inoccupé pendant quelques minutes car selon elle, "il y a toujours quelque chose à faire". Et c'est vrai que parfois, après le rush, il se peut que je prenne deux minutes pour rester en caisse pour me (re)poser mais ce n'est pas compris. D'ailleurs, les employés sont toujours occupés, c'est simple, parfois, on dirait des machines. Cette course au rendement déshumanise en partie le travail.

mardi 15 décembre 2015

Dis moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es

Le caddie des ménages est, d'une certaine façon, révélateur de leur niveau de vie via la manière dont ils s'alimentent. Et c'est malheureux de le dire mais je constate depuis bientôt dix jours, ce que j'avais lu à travers des enquêtes réalisées par le centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc): l'alimentation reflète les inégalités sociales et il y a une opposition à faire, selon moi, entre les classes populaires et les classes aisées dans la manière de se nourrir. En effet, les individus issus des classes défavorisées s'alimentent mal et mangent de façon peu équilibrée, contrairement à ceux dont les revenus sont plus importants.

Ainsi, un ménage modeste consomme beaucoup de plats préparés, de surgelés, de charcuterie, de pommes de terre, de gâteaux, comparé à un ménage "aisé" qui, lui, favorisera les produits plus sains comme la viande, le poisson, les fruits et légumes, les biscottes et confiture pour le petit déjeuner. (D'ailleurs, les gens aux revenus confortables, achètent souvent leurs fruits et légumes dans le marché couvert de Besançon, non loin de la place de la Révolution. Bouchers, poissonniers, producteurs locaux satisfont les désirs des clients en échange d'un porte-monnaie bien rempli, et selon moi, au prix de quelques abus cependant.) 
Il s'agit d'un constat général mais on peut aussi avoir une alimentation saine avec peu de revenus et inversement, naturellement. 
La différence s'explique par le montant qui diffère selon les produits. Consommer de la nourriture saine pour le corps et l'esprit a un coût que toutes les familles ne sont pas capables de prendre en charge, surtout quand elles sont nombreuses. Alors elles se rebattent sur des produits qui ne sont pas frais mais qu'elles apprécient, même si à cause des matières grasses, des conservateurs, etc, il n'est pas souhaitable d'en manger régulièrement. 
Une autre différence se perçoit également entre les catégories sociales via l'achat d'alcool: les individus issus des classes populaires n'en consomment pas du tout ou alors des bières bas de gamme et dont le goût, laisse, à mon avis, quelque peu à désirer.

On peut observer, en outre, que les ménages aisés privilégieront des produits de marque à ceux du magasin. Personnellement, cette différence là ne s'avère pas très pertinente car ayant comparé déjà quelques produits, ceux de la chaîne de magasins équivaut à ceux de marques bien connues. Mais dans l'alimentation comme dans le prêt-à-porter et dans d'autres domaines, les clients paient souvent en partie la renommée de la marque.

lundi 14 décembre 2015

Gaspillage à tous les rayons


De la nourriture pourtant encore consommable est jetée quotidiennement.
C'est un rituel auquel il est impossible de déroger et pour cause: dans un magasin d'alimentation, la plupart des denrées sont périssables et de ce fait, soumises à des règles d'hygiène très strictes. Chaque matin donc, un des employés a pour tâche d'effectuer "le contrôle fraîcheur" dans plusieurs rayons: fruits et légumes, viandes, et frais. 
Les viandes, par exemple, peuvent être vendues jusqu'à J+1 et soumises à promotion mais la plupart du temps, elles ne sont pas proposées à la clientèle après terme car le contrôle effectué en amont est rigoureux.

En ce qui concerne les fruits et légumes, l'appréciation est très objective: une banane un peu "piquée", c'est-à-dire avec des points noirs visibles, sera retirée de la vente, comme un kaki qui commencerait à être un peu mou ou une endive dont le bout des feuilles commence à peine à prendre un ton légèrement marron. Le problème, c'est que lorsque ces produits font partie de lots, c'est l'ensemble du lot qui est retiré de la vente car la plupart du temps, les sachets sont en plastique. En ce qui concerne les filets d'oranges ou de mandarines, l'astuce consiste à ouvrir le filet, à remplacer par les fruits en vrac, "les manquants", et à refermer le filet. Ce qui évite un trop grand gaspillage. Car finalement, c'est la conséquence fâcheuse, le gros point noir d'un contrôle fraîcheur strict imposé par l'enseigne, mais découlant de normes françaises et européennes. Sans compter qu'effectivement, un client sera toujours plus attitré par un beau fruit ou joli légume bien lisse et coloré à souhait. Chaque matin, ce sont plusieurs kilos de produits qui partent à la poubelle et ça fait franchement mal au coeur. Il fut un temps où un paysan du coin, m'a t-on raconté- venait chercher les sacs entiers pour nourrir ses animaux mais depuis quelques semaines, il est aux abonnés absent. Le supermarché n'a pas de partenariat avec des associations caritatives telles que la banque alimentaire ou les Restaus du Coeur, de fait, une nourriture encore largement consommable est régulièrement gaspillée.
On m'a assuré que des gens venaient récupérer les sacs et y effectuer leur tri. N'est-ce pas triste que dans la France de 2015, certains soient obligés de faire les poubelles des supermarchés pour se nourrir ou pour faire des économies sur l'alimentation?
A ce propos, l'Assemblée nationale a adopté, à l'unanimité, mercredi 9 décembre un ensemble de mesures visant à lutter contre le gaspillage (voir ce lien). Et même si la grande distribution n'est responsable de ce gâchis alimentaire qu'à hauteur de 5%, si demain, le taux approchait zéro on ne s'en porterait pas plus mal.

Ensuite, le débat est ouvert. Monsieur G, d'ordinaire pas très loquace et enclin à argumenter considère que ce n'est pas le rôle des grandes surfaces que de faire "l'aumône". Autrement dit que ce ne sont pas à elles d'assurer aux plus démunis de quoi s'alimenter et que c'est à cause de l'Etat « qu'on n'en est là ». « Si l'Etat versait des revenus corrects aux gens pour consommer quand ils sont dans la difficulté, ils n'auraient pas besoin de recourir à cette situation extrême des poubelles. » Et de renchérir: « L'Etat doit assurer le lien entre les associations et la grande distribution pour récupérer la nourriture non vendable tout en favorisant ce procédé. » En gros, il voudrait que l'Etat file une ristourne fiscale aux supermarchés parce que la bouffe qu'ils ne donnent pas à leurs clients, ce sont les pauvres qui la récupèrent et sur leurs dos, en plus. 
Sans trop exagérer, je crois être fidèle à la pensée de monsieur G. J'aurais bien voulu discuter davantage mais j'avais justement la tâche d'assurer le contrôle fraîcheur des fruits et légumes ce jour-là.

dimanche 13 décembre 2015

La ruée vers les promotions

J'ai toujours pensé qu'il s'agissait d'un truc de vieux que d'arriver au moins 15 minutes avant l'ouverture d'un supermarché. C'était, tout du moins, le souvenir que j'en avais, au moins avec l'une de mes grands-mères. 
Mais après quelques jours d'observation, je peux affirmer que non, à tous les âges, - ou presque, j'exclus les 18-30 ans- on est prêts à s'agglutiner devant les grandes portes coulissantes, dans le froid à grelotter, derrière son caddie, voire parfois collés carrément à la porte, histoire de la recouvrir en partie de buée. 
Les clients sont toujours une petite dizaine chaque matin, donc, à attendre impatiemment l'ouverture du supermarché. Mais les mercredis et samedis, jours de promotion, ils sont encore plus nombreux car souvent les articles sont en nombre limité et comme on dit, "le premier arrivé, le premier servi"
La dernière promotion en date s'est révélée être une très bonne affaire pour les cuisinières du coin venues se réapprovisionner en ustensiles de pâtisserie tels que les plats à gâteaux, les thermomètres et poches à douille, notamment utiles pour la préparation des macarons. Les promos sont tellement guettées qu'il n'est pas rare que certaines clientes nous parlent de forums sur lesquels elles échangent, par exemple. Mais la semaine dernière, une cliente est venue nous parler d'un produit dont elle était certaine qu'il sortait ce jour-là, même car elle avait été mise au courant « par Facebook ».  Une réplique qui a bien fait rire mon collègue, Monsieur G.  « Si maintenant, Facebook s'en mêle! » Inutile de préciser que cette dame a dû revenir le lendemain, ses infos étaient erronées.